Des fois, on est pris de frénésie et on enchaîne les jeux d’un certain genre. Ce fut le cas en ce mois de mars, qui rima avec « TPS » sans que je ne puisse savoir pourquoi. Quelques titres me rendant curieux depuis longtemps, j’avais décidé de les rayer de ma liste avec mes parties de ce mois-ci. Est-ce que ça valait le coup ? C’est parti pour le test rétro.
Lost Planet 3 (Xbox 360, 2013)
Jim Peyton est venu sur EDN-III aider les colons à s’implanter et à obtenir la Thermo-énergie. Ainsi, il pourvoit aux besoins de sa famille et il enraye la crise énergétique sur Terre. Sauf qu’EDN-III a une météo glaciale, des secrets honteux, et surtout, une vie indigène pleine de bestioles en colère, les Akrids…
Capcom a confié cet opus à Spark, coupable des médiocres Turning Point et Legendary. Lost Planet 3 a été fraîchement accueilli à sa sortie sur Xbox 360 et PS3. Par les joueurs d’une part, la pub ayant été discrète. Par la presse d’autre part, à cause de la concurrence. Entre payer plein pot un TPS basique et acheter The Last of Us ou Dead Space 3 la même année (ou même Uncharted 3 ou Gears of War 3 d’occasion)… Il paraît que le gameplay de LP1&2 ressemblait plus à Monter Hunter, mais c’est ma première fois sur EDN-III. Que vaut un regard vierge en 2021 ?
Finalement, ce test rétro a été plaisant. Le jeu étant un prequel, aucun souci pour m’immerger. Certes, c’est routinier et dirigiste. Ce faux open world n’est qu’une succession de corridors balisés. La technique est correcte, mais pas au niveau des hits de 2013. Les armes sont agréables sans plus. Les mécaniques sont cool (grappin, mécha) mais l’environnement scripté. Les ennemis sont variés mais les combats répétitifs et frustrants. Ça rame pendant les chargements in-game. Etc. Mais de la part de Spark, le bond qualitatif est énorme.
Je me suis retrouvé certains soirs à passer trois heures dessus sans m’en rendre compte. LP3 est un TPS lambda mais compétent, à l’atmosphère soignée, dont l’histoire réserve moult rebondissements pas forcément originaux, mais bien amenés. Il vaut plus que ses 3.99 € en promo sur le Xbox Live, mais pas les 19,99 € habituels (ce qui est moins que son prix en boîte aujourd’hui).
50 Cent : Blood on the sand (Xbox 360, 2009)
50 Cent vient de donner le dernier concert de sa tournée dans un pays chaud du Moyen-Orient (logique). Le manager n’ayant pas de quoi payer son cachet de dix millions de doulos, notre ami poète défonce la porte de son bureau shotgun à la main, pour le menacer de payer (quel type adorable). Parce que la vie, ça n’a pas de prix, la victime offre à ce psychopathe son second trésor inestimable : un crâne antique incrusté de diamants, que tout le monde cherche à s’approprier. « Fifty » et ses potes deviennent alors la cible de tous les truands armés de la région…
Tu aimes les intrigues débiles façon Commando ? Fan d’Arnold Schwarzenegger, tu te languis d’entendre des répliques macho bien nazes, ponctuées avec « bitch » et balancées par une star qui s’y croit ? Tu aimes les TPS explosifs, fournis en flingues et pas prise de tête, avec des courses en bagnole bourrines ? Tu peux vivre avec des mécaniques de jeu simples dont la moitié est absurde, comme acheter des insultes pour multiplier tes points de carnage ? Enfin, tu aimes Cinquante Centimes, le chanteur, et tu es prêt à payer le jeu juste pour avoir un album complet en fond sonore ? Je ne sais pas quoi dire, à part que tout ça combiné, ça donne un jeu extrêmement rigolo.
Jamais un test rétro ne m’a autant fait me gondoler. Est-ce que 50 Cent : Blood on the Sand est un chef d’œuvre ? Absolument pas. Est-ce qu’il ne coûte rien et vaut largement les quelques heures de poilade pour le terminer ? Je dis oui, et même les deux pouces levés si vous avez un pote avec qui jouer.
Stranglehold (Xbox 360, 2007)
L’inspecteur Tequila (Chow Yun Fat), héros du film À toute Épreuve de John Woo (1992), part en guerre contre les Triades, sur fond de conspiration menée par la mafia russe. Il n’y a qu’un moyen d’enquêter : flinguer à tout va comme un kéké, en slidant sur des rambardes, en faisant de la luge sur des chariots ou en plongeant au ralenti comme dans… un film de John Woo.
Stranglehold, c’est Max Payne avec la niaque d’un film de Woo. On a droit aux ralentis de rigueur, mais bien plus faciles à déclencher que dans les jeux de Remedy. L’environnement est quinze fois plus destructible et mortel pour l’ennemi. La localisation des dégâts est jubilatoire (mention spéciale au tir dans les castagnettes). Le jeu reproduit tous les gimmicks des films du maître, comme glisser en tirant, mais aussi les impasses mexicaines, et même les colombes le temps d’un « coup spécial » dévastateur. Même si l’histoire n’a rien d’un chef d’œuvre, Stranglehold est une transposition fidèle de la filmo du réalisateur (normal, puisqu’il y a vraiment collaboré, au point de faire un caméo dedans). C’est toujours fun à jouer quinze ans plus tard.
Dommage qu’il s’agisse d’un jeu Midway. Ils n’étaient pas les meilleurs pour laisser un souvenir impérissable (Area 51). Comparé à Uncharted sorti juste après, Stranglehold a l’air d’avoir un balai dans le train. Tequila est rigide, et les commandes ne répondent pas si bien lorsqu’on veut se mettre à couvert ou déclencher une animation contextuelle. Et les arènes étant truffées de portes, il arrive qu’on soit truffé de plomb par une vague d’ennemis sortant juste dans notre dos. Super. Ces soucis de gameplay et de level design n’ont pas tué le plaisir lors de ce test rétro, mais pour combien d’années encore ?
Kane & Lynch : Dead Men (Xbox 360, 2007)
Au cours d’un transfert de prisonniers, Kane, une ordure, est sauvé par Lynch, une autre ordure. Cette libération, Kane la doit aux Sept, une organisation à qui il a volé du fric, qu’ils « aimeraient » récupérer. Sinon, ils tueront sa famille. Lynch est censé le chaperonner, mais c’est un dangereux schizophrène qui carbure aux cachetons et qui a trop facilement tendance à faire un carton. Le duo improbable va beaucoup voyager, faire du bruit et s’attirer des ennuis…
À ma connaissance, le mot « gâchis » ne convient à aucun jeu mieux qu’à Kane & Lynch. Développé par Io, les responsables de Hitman tout de même, c’est un TPS à peine jouable et franchement énervant. Déjà, le jeu est « meh » techniquement, tant les animations que la modélisation dans l’ensemble. Ensuite c’est un cover shooter avec un système de couverture catastrophique : il faut vous approcher d’un coin, et non d’un rebord, pour que le personnage se mette tout seul à l’abri… ou pas. Enfin, vos armes sont ridiculement imprécises. Donnez à Kane un lance-pierres, et je suis sûr qu’il a deux fois plus de chances de tirer au but. Tous ces éléments étant vitaux pour la pérennité dans le genre, c’est une torture d’y jouer en 2021, même à deux, même pour un test rétro.
Dommage, car en dehors du gameplay, ce test rétro a eu ses moments mémorables : son histoire met en scène de vrais c#nn@rds irrécupérables (Heat rencontre The Devil’s Rejects), et certains moments sont vraiment immersifs ou inventifs, comme l’attaque du camion de chantier ou la traversée de la boîte de nuit, digne d’un film de Michael Mann. Mais Kane & Lynch a été un test rétro beaucoup trop douloureux pour recommander à quiconque d’y jouer, même sur PC.
Kane & Lynch 2 : Dog Days (Xbox 360, 2010)
Lynch vit à Shanghaï et fait venir son « pote » Kane pour un coup. À peine arrivé, Kane descend par accident la fille d’un ponte du gouvernement. Tout le monde se retourne contre eux, et il va leur falloir quitter la ville avant de se faire massacrer…
Kane & Lynch 2 est radical. Sur PS3, Xbox ou PC, soit on aime, soit on déteste. Rayon TPS, oubliez les grenades, cette fois, vous prenez et faites exploser tout ce qui ressemble à une bonbonne, comme dans Uncharted. La couverture se fait en pressant un bouton, mais vos armes ne valent toujours pas mieux qu’un pistolet à eau (mais j’ai compris que dégainer depuis une couverture avec l’aide à la visée peut one-shoter un type). Aussi, il y a moins de variété dans les missions. Fini l’escorte, vous tirez et point barre. Enfin, la campagne est courte, et la fin si ouverte et abrupte que c’est une blague.
Si on n’a pas de problème avec un TPS basique, ça passe mieux que le premier jeu. Mais l’approche esthétique divise le plus. Ce n’est pas juste l’univers qui est crade. Le jeu abuse de procédés du cinéma vérité et du film expérimental : grain DV, tremblements de caméra, artefacts lumineux, poussière sur l’objectif… Même le son grésille suite à une explosion. Et ne parlons pas de la pixellisation type « censure » sur le gore et la nudité des protagonistes. Un conseil, par contre : activez la caméra fixe, sinon, trop d’immersion rend le tout injouable.
Jeu de m**** ou expérience unique ? J’avoue pencher pour la seconde option. Quel autre titre vous fait vous évader à poil et en sang d’une séance de torture, pour continuer à vous balader ainsi, flingue en mains, dans les rues chaudes de Shanghaï ?
Pour finir sur une bonne note
C’est tout pour du test rétro rayon « découverte ». Mais le mois a aussi été l’occasion de refaire deux jeux finis à leur sortie, pour les réévaluer aujourd’hui. Le premier est Project Zero sur PS2 (2001), ou quand Resident Evil rencontre The Ring. Excellent élève, le jeu est toujours aussi unique grâce à son atmosphère et à son système de « combat », et il est suffisamment court pour ne pas avoir le temps de s’ennuyer.
L’autre titre est Silent Hill Downpour (2012), réputé assez faiblard, et qui a fermé la porte à la franchise de Konami pendant longtemps. Je dois reconnaître que l’exploration a été plus plaisante, cette fois. Même s’il est toujours techniquement moyen, la rétrocompatibilité Xbox permet d’atténuer (mais pas supprimer) les chutes de framerate. L’ambiance générale, si elle ne génère pas d’angoisse, a quelque chose d’envoûtant. Enfin, certaines quêtes secondaires sortent des sentiers battus grâce à quelques idées géniales, comme l’énigme du cinéma et des bobines. À retenter, selon moi.