Il y a bien longtemps, dans une galaxie lointaine, très lointaine vivait Han (Harrison Ford Alden Ehrenreich), pas encore appelé Solo mais vous allez voir, ça va venir très vite. Et puis il s’enfuit et il s’engage dans l’armée impériale par accident. Et puis trois ans après (l’espace d’un cut), il rencontre un wookie appelé Chewbacca et il rejoint le très cool Tobias (Woody Harrelson) et sa troupe de voleurs, parce qu’il a envie de devenir pilote pour partir dans l’espace et rejoindre rapidement sa chérie (Emilia Clarke). Oui parce que tout ça, c’était avant les trucs importants, les princesses, le sauvetage de la galaxie et le reste…
Il y a bien longtemps, dans une galaxie lointaine, très lointaine, La Guerre des Etoiles, c’était bien. Après la prélogie décevante du père George Lucas, on avait autant envie de faire mieux que peur de s’éparpiller. La dernière trilogie étant déjà un prequel foiré sur Vador, Disney faisait peur à en annoncer à tout bout de champ pour meubler entre deux épisodes de son, euh, après-logie.
(PDG de Disney : ) Préparez-en un sur Obi-Wan ! Et un autre sur Boba Fett ! Et pourquoi pas Yoda, aussi !
(Peter, présent par accident : ) Et pourquoi pas ta gueule, aussi ?
Solo, A Star Wars Story : “Sta’ faute !”
Rogue One était un prequel sur le vol des plans de l’Etoile Noire. Qui ça intéresse ? Pas grand-monde, mais malgré un réalisateur (et un compositeur !) changé en bout de course, le projet fut sauvé et le succès avéré. Sauf que Solo part cette fois perdant sur tous les fronts, peu importe la qualité de la marchandise. Les raisons :
- Sa réputation : son duo de réalisateurs doués pour la comédie, Phil Lord et Chris Miller, a été remplacé par Ron Howard. Or le monsieur est un faiseur désincarné capable du pire (Da Vinci Code) comme du meilleur (Apollo 13). Et dans ces conditions, on s’attend au pire.
- Sa date de sortie : parce qu’il sort seulement cinq mois après Les Derniers Jedi, fraîchement accueilli. Mais surtout, il arrive juste à la suite d’Avengers : Infinity War et Deadpool 2, et avant Jurassic World : Fallen Kingdom. Bon courage…
- Son sujet : la jeunesse de Han Solo. Qui ça intéresse vraiment ?
- La Chine : Hollywood compte maintenant moins sur les dollars que sur les yuans pour sauver son business. Malheureusement, Les Derniers Jedi a rameuté beaucoup moins de Chinois que Fast & Furious 8. Et la sortie de Solo là-bas a encore plus confirmé ce désintérêt.
“Youhouuuuuu ! Allez p’tit gars ! Fais-moi péter cette franchise et on rentre !”
Un film qui la joue solo
Bon. Et maintenant, le film, ça donne quoi au final ? Beaucoup de choses méchantes ont été dites à son sujet, et on imagine que la déception des fans nourrie par les tabloïds y a contribué. La vérité vraie, c’est qu’à l’image de son réalisateur, Solo n’est ni formidable ni médiocre. Il est juste terriblement “moyen”, ainsi que daté, dépassé dans sa conception d’un divertissement naïf et sans prise de tête. Ce qui est en quelque sorte une belle qualité, et raccord quand on repense aux débuts de la saga et son Nouvel Espoir assez campy.
Contrairement aux blockbusters et films de genres actuels, noirs et déprimants (l’Episode VIII aussi), Solo : a Star Wars story dégage un parfum de série B des eighties, un charme désuet qui donnerait l’impression qu’il a été exhumé des cartons d’un George Lucas frileux de se planter à l’époque, après ses errements au pays des Ewoks (revoyez La Bataille d’Endor, pour rigoler). Le spectacle est donc correct, mais sans surprises ni vrais coups d’éclats, à part quelques belles régions de l’espace inédites à l’écran (le “Maëlstrom” en tête et le prétendu raid de Kessel). Quant à l’humour, il patine parfois mais peut faire sourire, à défaut de se marrer.
“En route pour une suite ! … Comment ça, “non” ?”
Réussies également, ce dont personne n’avait besoin : les réponses sur la genèse du héros. Alden Ehrenreich ne joue pas telle une moule anesthésiée, comme tout le monde le prétend, et il s’approprie même des fois vraiment les mimiques d’Harrison Ford. Les rencontres avec les personnages clés de la légende (Chewbacca, Lando, le Faucon Millennium) sont enchaînées de façon un peu trop commode. Enfin, les petits nouveaux sont au diapason, c’est-à-dire dispensables : le mentor Tobias (joué par Woody Harrelson, toujours impec), le méchant Dryden (Paul Bettany, jamais gâté par le réalisateur), et bien sûr, la love interest Qi’ra (Emilia Clarke, transparente comme partout ailleurs que dans Game of Thrones). Au final, c’est la droïde L3-37 (Phoebe Waller) qui justifie le plus son existence, par son lien surprenant mais raccord avec le mythique vaisseau Millennium.
Au final
Le fan service est assumé avec application, mais sans passion. Solo reste un bâtard, un rejeton déformé né dans la douleur, et dont personne ne veut vraiment (à l’image d’un caméo totalement inutile dont tout le monde se serait passé). Il a ses qualités, mais qu’est-ce que vous voulez… Terminons sur un détail qui ressemble autant à une pique adressée à Lucas qu’à un troll pour les fans assidus de la saga : oui, cette fois, HAN ! SHOT ! FIRST ! Et ça, j’avoue, ça fait sourire.
LES + :
- C’est pas vraiment mauvais. Je veux dire : c’est correctement filmé, les acteurs sont pas si nuls qu’on le dit, les références sont raccord…
- Le film tient sa promesse de répondre à tout ce qui fait le personnage de Han Solo.
LES – :
- C’est pas totalement bon non plus : les effets spéciaux sont parfois vraiment spéciaux, les thèmes abordés sont maladroitement insérés dans l’intrigue, le caméo de (censuré) est un appel à la suite qui heureusement n’arrivera jamais…
- Le film tient trop bien sa promesse : on a l’impression que la légende s’est inscrite en deux jours !