Dans Terminator : Dark Fate, le Jugement dernier n’a pas eu lieu. Skynet n’a jamais été créé, et ses machines ne nous ont jamais exterminés à coups de bombes nucléaires. À la place, on a eu Marvel Studios, Trump et la woke attitude. Comme si ça ne pouvait pas être pire, un nouveau Terminator (Rev-9, joué par Gabriel Luna) arrive du futur, un nouveau futur. Celui où Légion a été créé, et ses machines nous ont exterminés à coups de bombes nucléaires. Grace (Mackenzie Davis), une femme cybernétiquement augmentée, lui emboîte le pas. Elle est décidée à ne pas le laisser accomplir sa mission : exécuter Dani (Natalia Reyes), une ado dont la vie ou la mort décideront du destin de l’Humanité. Ah oui !, et sans prévenir, une certaine Sarah Connor (Linda Hamilton) va venir se mêler de ce qui, logiquement, ne la regarde pas…
En sortant de Terminator : Dark Fate, mon ressenti était le suivant : ce nouveau sequel était « peut-être » le meilleur par défaut, étant donné la compétition. Terminator 3 se traîne toujours les casseroles d’avoir été la première suite sans James Cameron, en reprenant beaucoup de ses ficelles. Renaissance, malgré une direction couillue, a payé les frais d’une production chaotique et d’un scénario incohérent. Et Genisys demeure aujourd’hui une tentative écœurante de transformer la licence en saga à la Marvel. A priori, avec le retour de Cameron à la prod et au scénario, un pool de scénaristes à sa botte, et l’intention de faire une « vraie » suite à Terminator 2, on pouvait y croire. C’est oublier qu’à Hollywood, on aime bien jouer sur la crédulité de gens, et leur extorquer du pognon en faisant des promesses qu’on n’a plus l’intégrité de tenir.
« Terminated ! »
J’ai attendu un peu pour donner un avis à froid. Honnêtement, à l’échelle de la production actuelle de cinéma à grand spectacle, Terminator : Dark Fate constitue le degré zéro. Ce n’est ni un bon film qui restera dans les mémoires, ni un navet indigent. Il y a pire dans l’histoire du Cinéma. Malheureusement, c’était la pire suite possible pour le Terminaverse, autant artistiquement que dans ses intentions.
C’est frustrant que le papa de Terminator ait soi-disant parrainé ça. Soit Cameron a fini gâteux comme Ridley Scott, soit il a vendu son image de marque contre une rallonge pour le budget d’Avatar 2 et 3. Son nom était un peu la « caution garantie » du métrage, avec ceux de Linda Hamilton et Schwarzy. Malheureusement, la première ne s’est plus distinguée depuis un bail, et son retour ressemblait plus à un « cash grab » nostalgique honteux, façon Jamie Lee Curtis dans Halloween 2018. Quant à Schwarzy, ce ne serait pas son premier Terminator où il cachetonne. Et puis, quand on regardait les autres noms associés au projet, il y avait de quoi s’inquiéter.
« I won’t be back. »
D’abord le réalisateur, Tim Miller, qui est devenu un nouveau grand nom de la profession après le carton planétaire de Deadpool. Sauf que ce dernier ne brillait pas par sa réalisation plan-plan (on remercie plutôt son mauvais goût assumé et l’humour de Ryan Reynolds). Miller allait devoir faire ses preuves avec ce nouveau Terminator. Et il fait montre de la même absence artistique qu’avant. Quand ça ne cogne pas, le réalisateur filme à hauteur de genoux ou de ceinture. Les moments d’action sont découpés soit platement (la poursuite sur autoroute) soit n’importe comment (le passage de l’avion). Et ne parlons pas de l’éclairage de certaines scènes, tantôt neutre façon série télé, tantôt tellement sombre qu’on n’y verrait que dalle. Sur Terminator 3, Jonathan Mostow usait au moins de beaucoup de procédés pour produire de l’effet sur le spectateur. Miller, lui, se contente de filmer.
Et niveau effets spéciaux ? Ils suintent la crasse dès l’entrée en action du Rev-9 (la doublure numérique de Gabriel Luna pique les yeux). Et tout le dernier tiers de Terminator : Dark Fate est un empilement de morceaux de bravoure invraisemblables en CGI rugueux, qu’on jurerait sortis du prochain Fast and Furious. De la part de la « vraie suite » au blockbuster qui a établi de nouveaux standards en matière d’effets, ça fait mal. Et ne comptez pas sur le Rev-9 pour vous surprendre. Ses capacités physiques n’ont d’égale que sa pauvreté esthétique (sans parler du charisme limité de l’acteur). Seul truc louable : Rev-9 a l’esprit d’un « vrai » Terminator. Cela faisait quelques épisodes qu’on n’en avait pas vu d’aussi véloce et motivé pour tuer sa cible. Dommage que le film ne nous implique jamais assez pour en avoir quelque chose à cirer.
« There is no fate but what we remake. »
Côté scénario, c’est la cata. Que Cameron ait rassemblé plusieurs têtes pensantes fait bien rigoler (dont le créateur de la série Terminator et David S. Goyer). Les films qui ont précédé avaient un avantage certain sur Terminator : Dark Fate : ils avaient des idées. Trop peu (Terminator 3) ou beaucoup trop (Genisys), mais elles avaient le mérite d’exister.
Niveau intrigue, le film de Miller n’a ABSOLUMENT RIEN inventé. Il se contente d’assembler ici et là des éléments repris à T3, 4 et 5, sans développer ses propres pistes. (On pense à ce nouveau futur, parent pauvre de celui de Cameron, à peine esquissé. Mais aussi, on nous dit que des Terminator auraient continué à arriver du futur après T2, mais on ne sait pas pourquoi ni, surtout, comment.) Ce pillage est assez hypocrite de la part de gens qui ont fait leur promo en critiquant ouvertement leurs prédécesseurs. Si seulement le film nous en mettait réellement plein les yeux et les oreilles. Ou s’il nous surprenait ici et là d’une révélation ou d’une idée bien sentie.
Las, son originalité, il espère la trouver en actualisant prétendument son propos. Cameron disait que ses “mercenaristes” et lui avaient réfléchi à comment traiter de l’évolution de la technologie trente ans après le premier Terminator. Oui, il y a de ça (le Rev-9 peut se connecter à toute la surveillance des USA). Mais l’éveil des consciences ne proviendra pas de là. Il va falloir la trouver côté contexte et personnages, et ce n’est pas fameux.
« Nice night for a woke, eh ? »
Nous sommes à l’époque du mur de Trump et du woke. Terminator : Dark Fate joue trop là-dessus. Quelques semaines plus tôt, Rambo 5 se faisait démonter en l’assimilant trop rapidement au discours pro-Trump contre l’immigration. Je disais alors qu’il ne fallait pas tirer des conclusions trop tôt. Mais Dark Fate nous secoue l’évidence sous le nez même si on n’en a pas envie. Déjà, il y a la forte représentation de la population mexicaine, dont est issue l’héroïne.
Mais surtout, de nos jours, tout le monde revendique de plus en plus son droit à (remplir le blanc). Entre autres, les femmes revendiquent légitimement leur égalité avec les hommes, surtout dans une industrie où les scandales sexuels se multiplient. Or, Terminator : Dark Fate ressemble à des excuses publiques avec ses trois héroïnes pour le prix d’une. Pardon, trois mecs en perruques : la momie de Sarah Connor, l’antipathique Grace et l’énervante Dani (Natalia Reyes, jamais crédible).
La démarche en soi n’est pas le problème. C’est le résultat final. Narrativement, remplacez-les par des hommes et on ne voit pas la différence. Ensuite, cette approche trahit la vision de la femme des deux premiers Terminator. Déjà inhabituelle, elle était loin d’être honteuse. Surtout, elle intégrait une progression. Sarah Connor devenait forte tout en restant une femme belle, émotive et fière d’être mère. Le film trouve le moyen d’anéantir tout ça dans ses trente premières secondes, pour nous asséner une Sarah démolie et des remplaçantes jamais sympathiques ni à la hauteur. Mais attention, Terminator fait aussi dans le social. Dani a le temps de défendre son droit au travail pendant dix secondes avant l’arrivée du Rev-9. Et le T-800 en personne dit littéralement (sous couvert d’humour) qu’un homme idéal fait ce qu’on lui dit et ferme sa gueule. Plus parlant que ça tue mœurs !
Terminator, Dark Fate : system error
Terminator : Dark Fate, film à message ? Non, cela reste un produit de consommation bas de gamme, aux grandes promesses évidemment non tenues. Mais il pue la politisation d’une franchise qui s’en était abstenue jusqu’à présent. Terminator n’est plus une oeuvre universelle. On insère dans son histoire des références aussi inutiles que lourdement évidentes à la politique d’aujourd’hui. Mais bon. J’imagine qu’il faut bien ça, tant sa mise en scène et son découpage tiennent du zéro absolu. Son histoire n’a rien d’original DU TOUT et ses effets spéciaux font cheap. Sa B.O. est la plus quelconque de la franchise, et certains choix de casting tiennent du suicide (vous ne croirez jamais que la petite Natalia Reyes est la nouvelle Sarah Connor). Et bien sûr, on n’échappe pas à des dialogues pathos à fond, ni à deux ou trois clins d’œil éculés qui font davantage soupirer qu’autre chose.
Même le consternant Genisys faisait des efforts, sabordé surtout par l’absence de vision et de serrage de vis d’un vrai réalisateur. Mais il n’y a plus rien ici qui puisse nous faire réfléchir ni même nous amuser. Simplement nous agacer. On dira ce qu’on voudra, la vraie et meilleure suite à Terminator 2, ça reste ironiquement… Terminator 3.
LES + :
- Ben ça, alors ! J’aime Terminator Genisys, maintenant !
- Le Rev-9 est une saloperie qui vous fonce dessus dès qu’il vous voit, au lieu de marcher comme un méchant de slasher bas de gamme. Ça, c’est un Terminator.
LES – :
- Tim Miller = mauvais réalisateur.
- Cameron perd encore plus de crédibilité.
- Scénario honteusement bricolé et sans (bonne) surprise.
- Musique fadasse.
- Effets spéciaux en toc.
- Erreurs de casting flagrantes.
- Influences et/ou intentions politiques aussi déplacées qu’inutiles.
- Arnold en short.