Hobbs & ShawHobbs (The Rock) est papa, musclé, porté sur les protéines au petit déjeuner, et il est un fervent défenseur de la justice et des valeurs de l’Amérique. Shaw (Jason Statham) est l’ancien ennemi public numéro 1, il est beau gosse, b**** tous les soirs, prend sa binouze tous les matins au troquet du coin, et tout ça lui va. Leurs points communs ? Ils sont chauves, tabassent comme personne, et ils se haïssent copieusement. Mais le jour où Hattie (Vanessa Kirby), la sœur de Shaw, devient la cible de Brixton, un soldat amélioré que Shaw pensait avoir tué il y a longtemps, les deux n’ont soi-disant pas le choix. Ils vont devoir s’associer pour traquer le renégat et arrêter l’organisation aux commandes, la mystérieuse Eteon…

Vous trouvez ça con ? Vous avez raison. La bêtise est devenue le poinçon de la « marque » Fast & Furious, dont Hobbs & Shaw constitue le premier spin-off. Et malgré tout l’amour que je porte habituellement à ses co-stars, je dois avouer que la douche fut glacée.

“L’ego” star wars

Hobbs & Shaw est né de l’envie (des producteurs, des acteurs, mais aussi du public) de laisser respirer les charismatiques et badass personnages campés par The Rock et Statham. Ils sont apparus respectivement dans Fast 5 et Furious 7, avant de se donner joyeusement la réplique dans l’opus 8. Depuis, The Rock et Vin Diesel ont pris l’habitude de se clasher sur les réseaux sociaux, en sous-entendant fréquemment combien « d’autres » étaient en gros des branleurs ou des lâcheurs sur le tournage, suivant lequel balançait. Vin Diesel est même souvent soutenu par cette serpillière de Tyrese Gibson (lequel, à l’inverse du Rock et de Statham, tire la franchise vers le bas depuis des lustres).

La popularité grandissante de stars plus aimées que lui a logiquement donné des sueurs froides à l’interprète de Dom et Xxx. Ses deux camarades, The Rock en tête, sont donc partis se la péter avec leur propre projet. C’est mieux que de voir leur temps de présence et leur « mojo » dilués dans des aventures de plus en plus chorales et over the top. Hobbs & Shaw était donc attendu comme le messie, le Tango & Cash du nouveau millénaire, une erreur de cinéma qui pouvait miraculeusement devenir une nouvelle madeleine de Proust pour les fans de buddy movie et les amateurs d’action décérébrée.

Hop ! C’est chaud !

Las, le film de David Leitch échoue sur presque tous les plans. Il ne s’en sort que lorsqu’il délivre des scènes d’action absurdement grosses et apocalyptiques, dont c’est dommage qu’elles soient souvent si mal filmées. La caméra tremblante et le sur-découpage n’aident en rien à apprécier les empoignades entre Brixton et le duo vedette. C’est étrange de la part du gars qui a emballé les scènes de Atomic Blonde et Deadpool 2.

Mais si vous êtes venus voir Statham et The Rock, vous allez les voir. Souvent en très gros plans face caméra, en train de souffrir mentalement à improviser des vannes à la face de leur partenaire. Elles ne sont d’ailleurs jamais fraîches ou originales. Statham est british ? Il est souvent comparé au Hobbit ou à Harry Potter, quand on ne se moque pas de son cuir chevelu. The Rock a du muscle ? Bonjour les vannes sur la lotion pour bébé et son appétit d’ogre. Etc.

Ne comptez pas sur le reste du casting pour relever la sauce. Idris Elba a l’air de se faire ch*** autant que Bruce Willis sur le tournage de Die Hard 5, et Vanessa Kirby et Helen Mirren n’ont pas grand chose à faire. La première a beau kicker comme une déesse, elle est réduite à un McGuffin ridicule doublé d’une love interest pour Hobbs, au grand dam de Shaw (coucou Tango & Cash).

Hobbs & Shaw

Hobbs & Shaw : spin-off en mode “off”

Ma relation avec Fast & Furious a toujours été en dents de scie. J’avais adoré la connerie assumée des épisodes 5 et 6. Puis j’avais vomi sur le doigt fait à la suspension d’incrédulité du spectateur dans le 7e épisode. Enfin, j’avais toléré Fast & Furious 8 pour avoir retrouvé un peu de volonté narrative, pour ses scènes d’action absurdes mais uniques, et bien sûr pour The Rock et Statham. Mais faire un spin-off, à la base, cela implique de sortir du moule d’une série pour tenter autre chose (ce que la saga avait justement fait avec les épisodes 5 et 6).

Hobbs & Shaw n’est qu’une itération de Fast & Furious 8 sans Vin Diesel, c’est tout. Il ne conserve pas seulement l’ADN muté de la franchise, mais il se fait greffer des morceaux entiers de son cadavre :

  • Une menace technologique avec un méchant promettant de revenir dans la suite.
  • Des poursuites motorisées avec de nouveaux véhicules de ouf (cf. la moto articulée de Brixton, piquée au dernier épisode des Indestructibles) et des cascades toujours aussi absurdes.
  • D’interminables passages verbeux où nos héros reprennent leur concours de vannes du 8. Sauf que cette fois, ils sont longs et rarement drôles.
  • Le même discours sur la famille et l’importance du cœur, quitte à trahir complètement les personnages tels qu’ils avaient été introduits dans la franchise avant. Et bien sûr, la même tendance à l’exprimer sans nuance dans les dialogues. Parce que seuls les gamins et les idiots vont voir ces films, n’est-ce pas ? Alors il faut absolument qu’ils comprennent.

Bref. Hobbs & Shaw pique la gamelle de Vin Diesel au lieu d’oser faire son propre truc. Mais c’est la faute à qui ?

Hobbs & Shaw

Rock, papier, ciseaux, ROCK !

Qu’est-ce qui manque vraiment à Hobbs & Shaw pour fonctionner malgré ses nombreuses tares ? C’est simple : l’alchimie. Si les buddy movies comme L’Arme fatale, Tango & Cash ou 48 heures nous touchaient, c’étaient parce que leurs partenaires de jeu dansaient ensemble. Or, le film de David Leitch est uniquement à la gloire de The Rock. Sa démesure (tant de la personnalité que du physique) transpire à chaque image.

Qu’il vante les valeurs familiales ou qu’il retienne un hélico à bout de bras comme Captain America, c’est trop. Trop de guimauve, trop d’exploits cartoonesques, trop de The Rock. Une situation avec laquelle Statham, flegmatique et cool comme à l’accoutumée, ne semble pas trouver à redire. Le dernier tiers se déroule ainsi entièrement à Samoa dans la famille de Monsieur. Et on vous épargne combien la famille est sacrée, et toujours prête à taper des mercenaires pour renouer des liens. The Rock est même tellement sympa qu’il organise une représentation de Haka pour accueillir les méchants. La grande classe.

Pour faire bref

Hobbs & Shaw est un rendez-vous manqué et un pétard mouillé. Si vous êtes venus pour vous vider la tête, OK. Vous aimez The Rock et Statham uniquement parce que ce sont The Rock et Statham ? Pas de souci. Si vous avez adoré Fast & Furious 7 (le pire que la franchise peut offrir) pas de raison non plus de ne pas repartir pour un tour. Mais soyez avertis. Un film de ce genre est une réussite lorsqu’on rit avec lui. Hobbs & Shaw fait des efforts si grossiers et pathétiques, que ce soit dans l’action ou dans les échanges entre ses héros, qu’il provoque plus volontiers des rires de gêne ou de moquerie. Et ça, ça fait de la peine à Bibi.

PS : et à titre personnel, je suis furieux de voir que les ewoks de Max Force 2 sont bien plus redoutables et intéressants que le personnage de Brixton. Je dis ça, je dis rien… ^^

LES + :

  • Un casting qui fait plaisir…
  • On quitte Fast & Furious pour explorer de nouvelles idées…

LES – :

  • … mais des prestations qui font de la peine.
  • … oh, et puis en fait, non, c’est la même chose.
  • The Rock, The Rock, The Rock, The Rock, The Rock, THE ROCK !
  • Les seuls moments de surprise et de rire francs concernent des guests dans des rôles tiers, à l’enthousiasme communicatif. Or, on aurait aimé que cet enthousiasme transpire chez les deux stars principales.

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